Ségolène Royal se pose en leader de l'opposition et rêve de créer un grand "parti de masse"
LYON, PRIVAS, DIGNE-LES-BAINS ENVOYÉE SPÉCIALE
Pas à pas, Ségolène Royal regrimpe la montagne. L'ex-candidate socialiste fait son "devoir" en s'impliquant dans la campagne législative, mais elle prépare aussi sa stratégie pour s'imposer à la tête du Parti socialiste. "La politique, c'est un cheminement", dit-elle.
En trois étapes, jeudi 31 mai, Mme Royal est d'abord allée soutenir ses candidats : Najat Vallaud-Belkacem et Pierre-Alain Muet, à Lyon, dans le Rhône, respectivement sa porte-parole et son conseiller durant la campagne présidentielle ; Pascal Terrasse à Privas, en Ardèche, là où commença sa conquête de l'investiture du PS ; et enfin Jean-Louis Bianco, son codirecteur de campagne, à Digne-les-Bains, dans les Alpes-de-Haute-Provence.
Des fidèles indispensables, demain, pour représenter ses idées à l'Assemblée, et la soutenir dans le parti, en complément de "plein" de cadres locaux qu'elle dit avoir repéré dans les fédérations. "J'ai besoin d'être en appui sur des parlementaires nombreux pour continuer le travail", explique-t-elle sous le préau d'une école élémentaire de Privas, devant quelques centaines de personnes. Privas, là "où tout est parti", le 8 mars 2006, a-t-elle rappelé, et "où tout recommence"...
UN PS "SANS FRONTIÈRE"
A l'ensemble des candidats, Mme Royal assigne des "missions", se comportant en leader de l'opposition. "En tout cas, c'est comme ça que les militants me voient", confie-t-elle, confortée sur ce point par les sondages. "Voilà quatre missions que je donne à l'opposition", expose-t-elle à Digne : "Etre vigilant, surveiller, proposer, protéger. Pour chaque proposition de la droite, il appartiendra à la gauche d'opposer un contre-projet pour que les Français ouvrent les yeux et qu'ils comprennent qu'il y a une alternative." Aux électeurs et sympathisants, elle donne pour consigne de "continuer à venir sur Désirs d'avenir", son site Internet, et d' "adhérer au PS". "Le risque, commente Mme Royal en aparté, c'est que les nouveaux adhérents s'en aillent et que le parti se replie sur lui-même." Elle imagine une suite : "Créer un parti de masse, sinon ce sera toujours une machine à désigner les candidats." Un parti fondé sur de "nouvelles convergences", qui s'appuierait notamment sur les électeurs des cités qui ont voté massivement pour elle : "Il faut que la citoyenneté née pendant la campagne puisse conforter le Parti socialiste. Une époque nouvelle s'ouvre, des stratégies nouvelles sont à inventer."
BAYROU "AURAIT EU MATIGNON"
Ah ! si François Bayrou avait répondu à ses appels entre les deux tours de la présidentielle... "Il aurait dû fusionner, il aurait eu Matignon, affirme Mme Royal en petit comité. Je ne sais pas comment le PS aurait réagi mais l'opinion aurait suivi, les Français auraient adhéré, c'est la rénovation qu'ils voulaient... A un moment, l'histoire passe, il faut la capter. Il a manqué d'audace."
Depuis le 6 mai, l'ancien candidat centriste n'a plus donné signe de vie. Mais, à l'avenir, rien n'est exclu puisque Mme Royal revendique un PS ouvert, "sans frontière". "Localement", avec le MoDem, "il va se passer des choses pour les municipales", pronostique l'ex-candidate. Cette ouverture-là fera partie du travail de rénovation auquel devront s'atteler les socialistes après les législatives avec, chez Mme Royal, le dessein de recourir de nouveau à la méthode des débats participatifs. Dans ce cadre, elle compte réfléchir sur le succès du slogan de Nicolas Sarkozy "travailler plus pour gagner plus" comparé à la recette "traditionnelle" de l'augmentation du smic à 1 500 euros.
Pour affronter le président élu, "qui veut incarner à lui seul la droite et la gauche (...), le patronat et le syndicat - tout le monde est caressé", elle dresse la liste des "batailles" à mener : contre le bouclier fiscal qui bénéficiera "seulement à 15 000 contribuables" et contre la réduction des droits de succession aux "20 000 plus gros patrimoines" alors que les franchises médicales, "ça, c'est pour tout le monde" ; contre l'augmentation des heures supplémentaires qu'elle compare à "la légalisation du travail au noir" et qui, "en l'absence de cotisations, ne seront pas prises en compte pour la retraite".
A la "vague bleue annoncée avec le relais du pouvoir médiatico-financier et le pouvoir sondagier", Mme Royal oppose "une vague blanche", comme sa couleur fétiche de campagne, "sans référence historique bien entendu", et même "une vague de toutes les couleurs".
Isabelle Mandraud
www.lemonde.fr
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